Le rôle des syndicalistes

Publié le 23 juillet 2016 • Mis à jour le 30 mars 2023

Les syndicalistes ont un rôle central à jouer dans la prévention et la prise en charge des violences sexuelles et sexistes au travail.

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Dans chacun de leurs rôles tenus dans l’entreprise (délégué syndical, délégué du personnel, élu CE, membre du CHSCT), dans la fonction publique (permanents, élu-e-s CT ou CAP, membres CHSCT...) ou dans les structures syndicales (fédérations, syndicats, unions régionales et départementales etc.), les syndicalistes peuvent agir au niveau de la prévention, mais aussi dans la prise en charge des victimes.
La première mission sur le lieu de travail consiste à légitimer les organisations syndicales sur la question des violences sexuelles et sexistes. Il faut montrer aux victimes comme aux auteurs des violences que les syndicats agissent sur cette question. En effet, pour différentes raisons, la plupart des victimes ne considèrent pas les représentants du personnel comme un recours dans l’entreprise. Nous rentrons alors dans une sorte de cercle vicieux dans lequel les militant-e-s ne font pas de la lutte contre les violences sexuelles une priorité car les victimes ne viennent pas les voir ; et les victimes ne viennent pas les voir car les militant-e-s n’affichent pas leurs compétences ou leur intérêt pour le dossier.

La lutte contre les violences sexuelles et sexistes au travail doit faire partie des dossiers pris en charge par les organisations syndicales, au même titre que d’autres thématiques considérées comme plus « classiques » pour de meilleures conditions de travail.

LE CHSCT (Comité Hygiène Sécurité et Conditions de Travail)

La loi du 23 décembre 1982 qui a pour objet d’agir sur les conditions de travail, indique le rôle du CHSCT destiné à assurer le respect des prescriptions en matière d’hygiène et de sécurité.

L’article L4612-1 du Code du travail définit précisément les contours de cette institution :
« Le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission :
1- De contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l’établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ;
2- De contribuer à l’amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l’accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ;
3- De veiller à l’observation des prescriptions légales prises en ces matières ».
Depuis le décret n°2011-774 du 28 juin 2011, le CHSCT dans la fonction publique détient sensiblement les mêmes compétences que le privé.

Pour ce qui concerne la prévention du harcèlement dans son ensemble et sexuel en particulier, le CHSCT est un terrain d’action primordial.
En vertu de la loi du 2 novembre 1992, le Code du travail disposait déjà (article L122-46 à cette époque) que les salarié-e-s ne pouvaient être sanctionné-e-s, licencié-es ou faire l’objet de discriminations (...) pour avoir subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement (...) de nature sexuelle. Depuis la loi (n°2002-73) du 17 janvier 2002, un autre article (L1152-1) a été introduit, précisant qu’aucun-e salarié-e « ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Cette même loi étend le rôle et la mission du CHSCT dans ce double domaine, puisque « la protection de la santé du salarié » s’entend désormais aux sens « physique et mental » du terme. De plus, le Code du travail (article L4612.3) prévoit que ce même Comité « peut proposer des actions de prévention en matière de harcèlement sexuel et de harcèlement moral. Le refus de l’employeur est motivé ».

À cela s’ajoute l’article L1153-5 qui oblige l’employeur à mettre en œuvre une politique de prévention : « L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner. Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche, les personnes mentionnées à l’article L1153-2 sont informées par tout moyen du texte de l’article 222-33 du Code pénal ».

Parmi les principes généraux de prévention prévus à l’article L4121-2, la loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel a ajouté : « 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont dé nis aux articles L1152-1 et L1153-1 ».
violence.

Cet arsenal juridique complet n’attend plus que d’être utilisé par les équipes syndicales ! Faute de formation des élus, les CHSCT deviennent parfois des instances consultatives dont l’ordre du jour est dicté par le seul chef d’entreprise ou le DRH. Il faut savoir prendre des initiatives, et notamment proposer des actions de prévention du harcèlement sexuel et du sexisme (voir pages précédentes).

Les délégué-e-s du personnel

Apparu-e-s sous le Front populaire en 1936, les délégué-e-s du personnel (DP) ont pour mission de présenter aux employeurs toutes les réclamations individuelles et collectives relatives aux salaires et à l’application des lois et des conventions collectives, dans les entreprises occupant au moins onze salariés (art 2313-1 du Code du travail).
Ils-Elles sont élu-e-s, souvent sur liste syndicale : ils ne sont cependant pas officiellement des représentants syndicaux.
Les délégués sont les interlocuteurs naturels et réguliers (une fois par mois minimum) de l’employeur et les plus à même d’aborder les questions de violences sexuelles et sexistes lors des réunions DP.
La mission principale du DP est en effet de servir d’intermédiaire entre les salarié-e-s et l’employeur, d’être informé et consulté sur un certain nombre de questions, de faire le lien avec les autres institutions représentatives dans l’entreprise ou hors de l’entreprise (inspection du travail).
En outre, dans les entreprises de moins de 50 salarié-e-s, les délégué-e-s du personnel sont investis des missions dévolues au Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de travail (CHSCT). C’est également le cas dans les entreprises entre 50 et 300 salariés en cas de Délégation Unique du Personnel (DUP).

Si l’employeur ne prend pas les mesures nécessaires pour l’application des dispositions légales, le DP a la possibilité de saisir l’inspection du travail, et d’accompagner ce dernier lors des visites de contrôle dans l’entreprise.

Au niveau du droit

Article L. 2313-2

« Si un délégué du personnel constate, notamment par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral [ajout loi du 6 août 2012] ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement.

L’employeur procède sans délai à une enquête avec le délégué et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.
En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié, ou le délégué si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, saisit le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statue selon la forme des référés.

Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor ».

Zoom : Délégué du personnel homme

Dans l’absolu, la sur-représentation de DP hommes par rapport aux DP femmes est un problème. C’est pour cette raison que la CFDT incite ses équipes à une plus grande mixité des listes, comme le suggère également la loi de 2001 sur l’égalité professionnelle. L’application de la mixité proportionnelle dans les élections professionnelles, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2017, contribuera à améliorer la représentation des femmes dans les prochaines années.
Dans cette attente, et concernant le harcèle- ment sexuel, nous pouvons penser que l’appartenance au sexe masculin d’une grande part des délégués du personnel est un frein supplémentaire pour les victimes, plus à l’aise avec une femme pour s’exprimer.
Mais même si la principale raison du silence des victimes dans l’entreprise tenait au fait que la majorité des DP sont des hommes, il ne faudrait pas cependant s’en faire une excuse.
Les hommes élus qui se montrent sans ambiguïté dans leur attitude face au sexisme, et volontaires en af chant leur compétence pour prendre en charge les victimes, deviendront pour les victimes des interlocuteurs naturels dans l’entreprise.
Être un DP homme ne doit donc pas être un problème pour traiter ces sujets.

La loi du 31 décembre 1992 peut permettre d’appuyer, en cas de nécessité, l’action du délégué du personnel face à l’employeur. En effet, sa traduction dans le Code du travail précise, par l’article L2313-2, que les DP sont « les défenseurs des personnes et des libertés individuelles ».
Les dispositions de cet article sont applicables lorsqu’il existe des divergences sur la réalité de l’atteinte aux droits des personnes dénoncée par le DP ou lorsque l’employeur saisi d’une telle atteinte ne diligente pas d’enquête (cass. soc. 28 mars 2006, n°04-41.016, BC V n°126 ; RJS 6/06 n°690).

Article L. 1154-2

« Les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise peuvent exercer en justice toutes les actions résultant des articles L1152-1 à L1152-3 et L1153-1 et L1154-4 [les articles qui interdisent le harcèlement moral et le harcèlement sexuel]. Elles peuvent exercer ces actions en faveur d’un salarié de l’entreprise dans les conditions prévues par l’article L1154-1, sous réserve de justifier d’un accord écrit de l’intéressé.

L’intéressé peut toujours intervenir à l’instance engagée par le syndicat et y mettre n à tout moment ».

Pratiques syndicales

Pour remplir ses fonctions, le-la délégué-e du personnel a le droit d’afficher sur les panneaux mis à disposition, et de se déplacer dans l’entreprise pour prendre contact avec les salarié-e-s sur leur poste de travail.
Avec la section, il conviendra de réfléchir aux pistes qui permettront d’utiliser utilement ces deux pouvoirs pour convaincre et permettre aux victimes de s’exprimer, notamment par des campagnes d’information via des affiches ou des brochures. Cela pose plus largement la question des pratiques syndicales.

S’il est nécessaire de convaincre un employeur réticent à l’idée de mettre en œuvre une politique de prévention des violences sexuelles et sexistes, le premier argument qu’un-e syndicaliste peut avancer est qu’il est dans l’intérêt de la collectivité du travail dans son ensemble - et donc de l’employeur - d’évoluer dans un milieu exempt de violences.
Le rôle de l’employeur est de veiller à maintenir un climat de travail serein. Celui du syndicat est de l’inciter à le faire.

Une des premières préventions consiste à diffuser un message clair auprès des salariés : « aucune tolérance face au sexisme dans l’entreprise, sévères sanctions pour les auteurs de harcèlement sexuel ». Doivent venir ensuite des actions de sensibilisation, de formation, de dispositifs d’accueil des victimes, qui peuvent (mais pas nécessairement) s’envisager par un accord d’entreprise.

Un exemple d’intervention en CHSCT

« « Le législateur a rédigé une loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel qui renforce votre obligation de prévention née notamment de l’article L1153-5 du Code du travail « L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement sexuel ». Nous souhaitons savoir quelles sont les mesures que vous avez déjà prises, et celles que vous allez prendre pour prévenir le sexisme et les violences sexuelles et sexistes dans l’entreprise ? ». »

L’employeur peut répondre :

1) « Pourquoi cette question : il n’y a pas de harcèlement sexuel dans mon entreprise ! ».

Deux réponses possibles (au moins !) :
- C’est un sujet sur lequel les victimes ne parlent pas spontanément, mais nous avons eu quelques retours qui nous laissent penser qu’il y a des formes de sexisme dans certains services : l’absence de communication sur le harcèlement risque de favoriser les comportements à risque : vous devez donc jouer votre rôle de prévention.
- « 25 % des agressions sexuelles ont lieu dans le cadre du travail, 1 femme sur 5 est victime de harcèlement sexuel dans son parcours professionnel : s’il n’y a pas eu de cas, tant mieux. Mais on ne va pas attendre qu’il y en ait un pour agir. D’autant plus qu’on vient de vous rappeler vos obligations ! ».

2) « Il est inscrit dans le règlement intérieur, à l’article XX, que le harcèlement sexuel est interdit sur le lieu de travail »

Votre réponse spontanée : « L’inscription au règlement intérieur n’est pas suffisante pour qu’on puisse considérer que « toutes les dispositions nécessaires » sont prises pour prévenir les agissements de harcèlement sexuel ».

Pour la CFDT, il faut à minima un message clair qui peut être rappelé en réunion de service par les cadres intermédiaires ou agents de maîtrise :
- Aucune tolérance face au sexisme dans l’entreprise,
- Sévères sanctions pour les auteurs de harcèlement sexuel,
- et dispositif mis en place pour les victimes.

3) « Non,je ne veux pas :on n’a pas de cas, on n’en aura jamais ».

Depuis plusieurs années, la CFDT travaille spécifiquement sur les questions de violences sexuelles et sexistes au travail : formation des militants, brochures et affiches, site Internet dédié... Il ne nous semble pas possible d’af rmer qu’une entreprise soit préservée des agissements de harcèlement sexuel. Par ailleurs, ce n’est évidemment pas parce qu’il n’est pas visible qu’il n’existe pas !

La prévention, comme nous vous l’avons dit, est simple à mettre en place.

Et s’il ne change pas d’avis :

Nous regrettons votre refus de prévenir le harcèlement, mauvais signal fait à vos salariés et salariées. Nous en prenons acte, et nous nous réservons le droit de le communiquer largement. (Bien entendu, il faut adapter cela aux relations sociales dans votre entreprise !).

4) « La loi existe : elle est écrite et applicable et c’est de la responsabilité de chacun des salariés de l’appliquer »

Et non ! Si cette affirmation s’entend sur les dispositions pénales à l’encontre des auteurs, l’entreprise a la responsabilité de la santé physique et psychique (la cour de Cassation est sévère envers les employeurs à ce propos). Les auteurs des faits de violences sexuelles et sexistes dans le cadre du travail ne sont donc pas les seuls responsables de leurs actes.

5) « J’ai mis en place des mesures de prévention »

Il cite lesquelles. Et vous approuvez si ces initiatives vous semblent correctes.
Toutes ces hypothèses de questions et de réponses ne sont que des hypothèses. à chacun d’adapter en fonction de ses instances et de leurs compositions !
violence

Dans la fonction publique

L’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique souligne dans son Axe 4 que l’employeur « fonction publique » doit prévenir toutes les violences faites aux agents sur leur lieu de travail et lutter contre le harcèlement sexuel et le harcèlement moral.

Cela peut prendre les mêmes formes que le droit privé, en invoquant par exemple la mesure n°15 de cet accord qui précise que les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et les acteurs opérationnels en matière d’hygiène et de sécurité (médecins de prévention, médecins du travail, assistants sociaux, psychologues du travail, etc.) doivent être mobilisés, chacun dans son champ de compétence, dans les démarches de prévention. À nous, syndicalistes, de les mobiliser !
Nous pouvons également nous appuyer sur la circulaire relative à la lutte contre le harcèlement dans la fonction publique éditée à la suite de la Loi du 6 août 2012. Elle précise les nouvelles dispositions relatives aux délits de harcèlement sexuel et moral prévues par la loi pénale et leur impact dans les trois versants de la fonction publique.

À cet égard, outre les sanctions des comportements de harcèlement et les mesures de protection des victimes de tels agissements, la circulaire rappelle également que les situations de souffrance liées à ces agissements au sein de l’administration rendent impérieuse, en amont, la mise en œuvre de mesures préventives. Elle précise que la première des préventions repose sur le devoir, pour l’autorité hiérarchique, de faire cesser l’existence de troubles dans le service.

Les recours externes à l’entreprise

Les services de santé au travail

(décret du 30 janvier 2012)

Les services de santé au travail ont pour mission exclusive d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail.
À cette fin, ils :

• Conduisent les actions de santé au travail, dans le but de préserver la santé physique et mentale des travailleurs ;
• Conseillent les employeurs, les travailleurs et leurs représentants ;
• Assurent la surveillance de l’état de santé des travailleurs ;
• Participent au suivi et contribuent à la traçabilité des expositions professionnelles et à la veille sanitaire...

Les missions des services de santé au travail sont assurées par une équipe pluridisciplinaire de santé au travail comprenant des médecins du travail, des intervenants en prévention des risques professionnels et des infirmiers.

Le médecin du travail exerce un rôle préventif et conseille l’employeur, les salarié-e-s et les représentants du personnel en matière de santé et d’hygiène au travail. Il contribue notamment à l’amélioration des conditions de vie, de travail et d’hygiène dans l’entreprise, la prévention des risques d’accident du travail.

S’il le juge nécessaire, le médecin du travail peut proposer une mutation ou une transformation de poste au vu de l’état physique et mental du salarié. L’intervenant en prévention des risques professionnels dispose de compétences techniques ou organisationnelles en matière de santé et de sécurité au travail (art. R. 4623-37), du temps nécessaire et des moyens requis pour remplir ses missions.

Dans un objectif exclusif de prévention, il assure des missions de diagnostic, de conseil, d’accompagnement et d’appui et communique les résultats de ses études au médecin du travail (art. R. 4623-38).

Zoom Le rôle du médecin du travail

Il est défini à l’article L4624-1 du Code du travail dans un but exclusivement préventif qui consiste à « proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformation de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge, à la résistance physique ou à l’état de santé des travailleurs (...) ».

Dorothée Ramaut (Journal d’un médecin du travail, Cherche-midi, 2006), octroie une deuxième grande mission à sa profession :

« une action sur le milieu du travail : le médecin du travail est le conseiller du chef d’entreprise ou de son représentant, des salariés, des représentants du personnel et des services
sociaux. Son champ d’action couvre l’amélioration des conditions de vie ou de travail dans l’entreprise (...) ».
Dans ce même ouvrage, elle note plus loin que :
" Malheureusement, avec certains confrères, le dialogue est extrêmement difficile, ils pensent parfois que nous sommes aux ordres du chef d’entreprise et que notre rôle est d’aider le patron à faire une sélection ».

Ceci peut expliquer que le médecin du travail n’est pas un interlocuteur naturel des victimes de violences sexuelles et sexistes. En 1990, la sociologue Sylvie Cromer notait déjà que « concernant le harcèlement sexuel, [la médecine du travail] ne constitue que le sixième recours, dont les salariés précisent rarement le résultat obtenu ».

Ce constat est regrettable, car une intervention adaptée d’un médecin du travail sensible à ces questions auprès d’une victime de harcèlement sexuel peut s’avérer capitale en termes de protection de la santé et dans le rapport de force à instaurer avec un employeur récalcitrant.
Il ne faut pas négliger ce relais, d’autant que les décrets du 30 janvier 2012 relatifs à l’organisation des services de santé au travail et de la médecine du travail leur donnent de nouveaux moyens. En outre, la loi du 6 août 2012 sur le harcèlement sexuel a précisé que le médecin du travail avait un rôle de conseil en matière de prévention du harcèlement sexuel (article L4622-2 CT).

L’Inspection du travail

Invitée permanente du CHSCT, l’inspection du travail a pour mission générale de veiller à l’application du droit du travail. Pour ce faire, les inspecteurs et inspectrices du travail disposent d’un droit d’investigation qui leur donne notamment un droit d’entrée et de visite sans avertissement préalable. Ils peuvent également mener une enquête, notamment en interrogeant les salarié-e-s, et en demandant communication des documents.

Les inspecteurs du travail constatent également les infractions commises en matière de discriminations prévues à l’article 225-2 (3° et 6°) du Code pénal, les délits de harcèlement sexuel ou moral prévus, dans le cadre des relations de travail, par les articles 222-33 et 222-33-2 du même code.

Notons enfin que l’inspecteur du travail est tenu à diverses obligations dont :

• l’impartialité (attitude excluant toute manifestation de préjugés),
• la confidentialité des plaintes,
• la discrétion tant à l’égard de l’employeur que des salarié-e-s et des représentant-e-s du personnel.

Nous conseillons systématiquement aux victimes de violences sexuelles et sexistes de saisir l’inspection du travail et a minima de la mettre en copie des courriers dénonçant auprès de l’employeur les faits dont elles sont victimes.

L’Association contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT)

L’AVFT est une association indépendante. Elle ne dépend d’aucun parti politique, n’a aucun lien structurel avec un syndicat ou une autre association, ne fait pas partie d’une fédération d’associations qui défend les droits au travail et à l’intégrité de la personne.

L’article 2 de ses statuts stipule : « L’AVFT agit pour faire disparaître les violences patriarcales de toute nature, notamment sexuelles, dont les femmes sont les principales victimes. Elle milite pour garantir la liberté, l’intégrité, l’inaliénabilité, notamment physique et sexuelle, des individu-es.

Elle s’est cependant spécialisée dans la lutte contre les discriminations sexistes et des violences sexistes et sexuelles dans le cadre du travail. Compte tenu de cette spécificité, l’AVFT s’attache à ce que les employeurs remplissent leurs obligations légales et jurisprudentielles en matière de harcèlement sexuel, de protection et de sécurité des salarié-e-s ».

Les moyens de cette lutte sont notamment de :

- soutenir, de défendre et d’intervenir auprès des victimes de discriminations sexistes et de violences sexistes et sexuelles, en particulier lorsqu’elles sont commises dans les relations de travail, qu’elles soient majeures ou mineures,
femmes ou hommes,

- dénoncer ces violences et de sensibiliser la population par tous les moyens adaptés ; plus généralement, d’agir a n d’impulser des prises de conscience individuelles et collectives,

- sensibiliser et de former les personnes et les professionnel-les ayant un rôle à jouer dans le dévoilement, la prise en compte, la prévention et la sanction des violences sexistes et sexuelles.

- effectuer des recherches, notamment juridiques, sur les violences sexistes et sexuelles et plus globalement sur les violences contre les femmes ».

L’association peut jouer un rôle de conseil auprès de militant-e-s qui seraient en difficulté dans la prise en charge d’une victime.

Téléphone : 01 45 84 24 24 (de 9h30 à 15h du lundi au vendredi)

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